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Veni, vidi, vinci

16 avril 2007

une lettre à La Poste

Madame, Monsieur,

Devant envoyer l’autre jour une lettre recommandée, j’ai eu la chance de faire la queue dans le bureau de poste de la rue Philippe de Girard à Paris. J’ai d’abord cru qu’un nouveau Jeudi Noir venait d’avoir lieu, avant de découvrir que les gens qui hurlaient et se pressaient n’étaient autres que des usagers, bien mécontents, car ils étaient une quarantaine alors que deux guichets seulement étaient ouverts. A la suite d’une altercation avec une femme édentée qui émettait des doutes violents sur les capacités professionnelles et les mœurs sexuelles des guichetiers, je me suis résolue à quitter le bureau pour les cieux plus hospitaliers, du moins le croyais – je , du treizième arrondissement.

Là – bas, une autre surprise m’attendait : la foule hystérique avait fait place à une file d’attente morose telle qu’on pouvait en voir les jours d’arrivages de concombres dans les magasins d’état de l’URSS. Plus loin, un groupe morne était échoué dans les attitudes des personnages du Radeau de la Méduse, attendant un conseiller financier qui, tel le raccourci de David Vincent, ne vint jamais. Devant la caisse prioritaire se bousculaient des femmes enceintes qui comparaient les dates de conception de leurs enfants pour établir une priorité entre elles. Cà et là, dans la file, des usagers infligeaient aux autres des analyses politiques d’où il ressortait clairement que la France allait mal, que seul le maréchal Pétain était habilité à faire sortir le pays de la crise. Quelques Fouquier – Tinville au petit pied, râlant à mi – voix car on est jamais trop prudent, voulaient décimer les guichetiers pour faire un exemple. Quant à ceux – là, l’air las et terrifié, ils subissaient patiemment les assauts des gens qui avaient manifestement oublié, pendant leur deuxième heure d’attente, les règles élémentaires de la politesse. De temps en temps, un des passagers du Radeau de La Méduse s’effondrait, tandis que le reste du groupe agitait faiblement un mouchoir, lorsqu’au loin passait un conseiller financier. Après trois quarts d’heures d’attente suante, j’ai enfin pu déposer mon recommandé.

Je voulais vous faire part de mon inquiétude, mais depuis, j’ai appris que vous aviez pris la mesure de la gravité de la situation, puisque La Poste s’apprête à débloquer des fonds afin d’acheter 5000 écrans plats qui feront paraître l’attente moins longue ( Le Parisien du 20/03/07). Je vous écris donc afin de vous remercier, tout en me permettant de vous donner quelques initiatives. Pourquoi ne pas fournir aux usagers des kits de survie « La Poste », contenant des barres vitaminées, des réchauds de poche, des tentes et des appareils qui permettront de recueillir la rosée et de recycler les excréments ? Pourquoi ne pas organiser des combats à mort entre deux usagers, ou entre un usager et un guichetier, armés différemment pour que le combat dure plus longtemps?

Cordialement,

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11 avril 2007

produits bancaires

Voici une lettre que j'ai envoyée à La Poste à la suite d'une overdose d'envois de "contrat Vivaccio", un produit financier qui vous rend riche et beau et cuit vos oeufs. On peut l'adapter à n'importe quel produit financier , j'imagine, avec des variantes. Bon, ça coûte un timbre. ( si vous voulez voir à quoi ressemble ce produit déprimant, allez voir tous seuls. je l'ai assez vu dans ma vie pour ne pas le mettre sur mon blog)

Madame, Monsieur,

Vous m’avez récemment envoyé une publicité concernant le contrat « Vivaccio », « le premier contrat tout en un qui conjugue assurance vie, garantie, option et service d’assistance ». Si j’ai bien compris, ce contrat se décline en cinq formules, à savoir « Vivaccio initial »,  « Vivaccio essor », « Vivaccio Vitalité », « Vivaccio Revenus » et « Vivaccio Harmonie », chacun de ces contrats visant une tranche d’âge, « parce qu’on a plusieurs vies dans une vie », dites - vous.

Pour illustrer votre propos, vous utilisez une série de poupées russes très laides ( une par tranche d’âge), sortes de Vénus primitives en forme de bouteilles de Perrier. » Vivaccio initial prendra la forme d’un poupon hideux et informe, qui agrippe une poupée et un biberon. Pour «  Vivaccio Essor », qui sourit d’un air béat, les cahiers remplacent la poupée et le MP3 a pris la place du biberon. Vivaccio Vitalité, allégorie de la femme épanouie, est vêtue d’un tailleur beige orangé, tient un portable et un sac à la main. Hélas, le temps aux plus belles choses se plaît à faire un affront, et fanera les roses de madame Vitalité. Vient la sénescence : madame Vivaccio Revenus a délaissé la vie active , elle porte désormais une chemisette rosâtre et une salopette confort, et ne tient plus qu’un seul objet ( vraisemblablement à cause d’un début de Parkinson, à moins que le cancer du cerveau contracté à cause d’un usage abusif du portable ne l’empêche de tenir deux objets en même temps), un appareil photo, qui lui permet d’immortaliser les pays dans lesquels elle pratique le tourisme sexuel. O temps ! Suspends ton vol ! Mais la nature cruelle est là, qui transforme madame Revenus en madame Harmonie. A la suite de cette décrépitude finale, madame Harmonie a renoncé à toute trace de féminité : elle tient un pot de fleurs et une bêche : on devine qu’elle attend tranquillement la mort et taille ses buis en attendant de manger les pissenlits par la racine.

Je ne reviendrai pas sur les titres des contrats Vivaccio : le publicitaire fou dans sa tête qui a pu appeler « Vivaccio Harmonie » un contrat destiné à des vieillards ignore tout des cruautés du grand âge. Là où la franchise lui imposait un choix cruel, mais nécessaire, comme « Vivaccio Agonie » par exemple, il a préféré un mensonge éhonté. Je ne le félicite pas.

Je tenais à vous informer que votre publicité provoque un état dépressif quasi immédiat chez tout être humain normal. Votre vision de la vie, contaminées par les valeurs boueuses véhiculées par des programmes tels que Plus Belle La Vie ou la réclame pour le jambon Herta, est sinistre, à moins que votre cœur de cible ne soit composé de lapins albinos hallucinés par des visionnages quotidiens de Derrick et de L’Inspecteur Barnaby.

Il m’est quant à moi impossible de m’identifier à des poupons bouffis en tailleur beige orangé. De plus, n’ayant ni projets, ni avenir, ni revenus, ni enfants, je ne puis souscrire à votre contrat.

Veuillez agréer, madame, monsieur, mes meilleures salutations

20 février 2007

Le Secret de Brokeback Mountain

Le secret de Brokeback Mountain se déroule en grande partie à Brokeback Mountain. Engagés comme vachers dans une séquence initiale que j’ai ratée parce que je suis arrivée en retard, nos deux héros, Jack et Ennis, vont devoir faire face aux fugues du bétail, à des suspicions d’encéphalite spongiforme bovine, au climat -plutôt rude- du Montana (ou du Wyoming), et à une irrésistible attirance naissante. Jack et Ennis ne sont pourtant pas des pédés : d’un seul coup de coude, ils arrêtent la course d’un taureau lancé au galop. Ils vivent de conserves périmées (qu’ils ouvrent à coup de dents) pendant trois mois au cœur d’une tempête de neige, et tètent leurs vêtements humides pour avoir de l’eau potable. Ils se baignent dans des torrents pleins de tétanos qui charrient des glaçons. On voit les superbes paysages du Montana (ou du Wyoming), les veaux qui s’égaillent çà et là, et le corned beef, lourd de menaces, qui cuit dans la marmite. Jack et Ennis ne sont pas cow-boys à plein temps : ils n’ont donc pas la ressource, comme John Wayne et Dean Martin en leur temps, de comparer la taille de leurs pistolets pour sublimer leur passion naissante. Au bout de trente minutes, le corned-beef a bouilli, La situation et Jack basculent, et c’est l’escalade. Rien ne préparait nos héros à une telle aventure, et leur vocabulaire plus que restreint, composé grande partie de « homphf » et de « grunt » virils, ne leur permet pas d’analyser la complexité des sentiments qui les unissent. En attendant la fin de la saison, ils surveillent d’un œil distrait les veaux et jouent à chat dans les paysages du Montana (ou du Wyoming). Mais un jour, la saison est finie : adieu, veaux, vaches, cochons ! Jack et Ellis finissent par retourner à leurs moutons, et épousent chacun une créature insignifiante à 350 km, histoire de bien simplifier les choses. Pour autant, rien n’est fini entre eux, et lorsqu’il se recroisent, 4 ans plus tard, il suffit d’un coup d’œil pour ranimer leur passion naissante. Hélas, Jack a élu domicile dans la série Dallas, tandis qu’Ennis passe des années de galère avec sa femme à qui il fait un enfant par an, ce qui correspond à peu près au nombre de leurs rapports sexuels ( un rapport avant chaque transhumance). S’ensuivent une série de mensonges qui détruisent les deux familles. Sous des prétextes fallacieux (chasse, pêche, achat de cigarettes, courses urgentes), Jack et Ennis se retrouvent 3-4 jours par ans à Brokeback. Les épouses, fatiguées d’attendre, commencent à se douter de quelque chose, sauf que c’est pas encore ça. A la question « il y a une autre femme, c’est ça ? », Jack et Ennis nient, le front pur et l’œil serein. Finalement, la femme d’Ennis qui l’a découvert en train d’embrasser Jack près de la remise à bois, refuse d’écouter ses excuses embarrassées (« il avait quelque chose au fond de la gorge » « c’était du bouche-à-bouche »), recoupe tous les indices (mais pour le bois, ce sera à Ennis de le faire) et s’en va, emportant ses enfants et sa rancœur. Quant à Jack, il drague tout le casting masculin de Dallas, et délaisse sa femme qui porte désormais une choucroute sur la tête, ce qui ne va pas manquer de lui attirer des ennuis. Au bout d’une heure trente environ, c’est le drame: Jack meurt accidentellement  victime d’un démonte-pneu qui s’était échappé, se jetant dans la rivière pour enfin s’arracher les parties génitales à coups de dents. Ennis ne serait pas loin de soupçonner le meurtre homophobe, mais n’est-il pas égaré par la douleur? Il sera beaucoup pardonné au Secret de Brokeback Mountain en raison des jeux de mots innocents que son titre permet. Et mine de rien, c’est toujours agréable de contempler les paysages du Montana (ou du Wyoming)
20 février 2007

Rochester, le dernier des libertins

Pour réaliser Rochester, le dernier des libertins, Laurence Dunmore, un petit sournois, a visiblement récupéré les acteurs et les décors d’Orgueil et Préjugés (voir cet article) . Pour un coût minimal, il a donc pu réaliser son film en douce comme si de rien n’était. Le comte de Rochester (interprété par Johnny Depp) est bien malheureux : il est beau, jeune, riche, favori du Roi Charles II (qui lui pardonne ses fredaines et l’embastille quand il va trop loin). Sa femme qu’il a enlevée est riche à mourir et folle de lui, et il possède des domaines immenses. C’est bien trop pour un seul homme, aussi le comte défie le Ciel et un scénario particulièrement inepte en disant des gros mots et en attrapant la syphilis, On voit bien qu’il est libertin, parce qu’il a les cheveux gras, qu’il porte des chemises sales et déchirées ouvertes sur le devant, et qu’il drague sec. L’action se passe au XVII ème siècle, tout le casting est sale. A la cour règnent donc un parfum de scandale (en plus du parfum de crotte qu’on imagine fort bien) et Charles II. Tout n’est que luxure, calme et volupté : Johnny fait des mots d’esprits, Johnny participe à des bals – musqués, vu la tête sale des participants - , mais patience : Johnny finit par attraper la syphilis. Couvert de boutons au début, il ressemble de plus en plus, au fur à et mesure qu’avance le film à un petit salé au lentilles à consommer avant fin 1986, ne pas dépasser la date limite. Il a un autre point commun avec le cassoulet : il adore mettre les gens en boîte. Cela dit, rien n’arrête Johnny : ni sa tête de cassoulet, ni les foudres de John Malkovitch, (qui préfère être dans sa peau que dans celle de Johnny Depp, et on le comprend), ni la misère, ni l’incompréhension de ses proches, qui le pressent d’arrêter de faire des happenings où les acteurs se barbouillent de sperme et de sang, des années avant l’angry generation. En effet, Rochester est passionné de théâtre, et décide d’aider une jeune actrice à devenir une grande actrice. Evidemment, Johnny ne sait pas aimer, et l’actrice n’aime pas le petit salé au lentilles (même si elle accepte de passer à la casserole). A la maison, la femme de Johnny pleure et fait cuire de la potée auvergnate en souvenir de son mari, qui pratique au sens propre la distanciation brechtienne, puisqu’il parvient désormais à laisser à distance des morceaux de son corps un peu partout. Johnny et l’actrice vivent une folle passion pleine de déchirements (au sens propre pour Johnny). Les années passent, Johnny se radicalise, enfonce Stanislavski, Brecht et Kamel Ouali : il finit par réaliser un spectacle qui met en scène un phallus géant et ridiculise la cour de France devant l’ambassadeur de France. Pour le coup, celui-ci est vraiment très furieux, et John Malkovitch décide de punir Johnny. Johnny joue au petit Poucet, et se disperse (toujours au sens propre) pour échapper à ses poursuivants. Ses amis le délaissent, l’actrice l’abandonne, seule sa femme lui est fidèle et le recueille tandis que de ses lèvres pourries, il blasphème encore. Entretenir Johnny est un rude travail : il a beau se répandre (au sens propre, encore) en excuses, il n’en demeure pas moins qu’il salit tout. Le dernier des cassoulets , tout bouillant de colère, sort tout de même de son lit pour aller sauver la monarchie. Et quand Johnny s’en va- t-en guerre, ça fait mal : confrontés aux arguments frappants de Johnny et à sa tête de monstre, les factieux ont tôt fait de s’enfuir pour prendre un bain. Enfin Johnny finit par mourir entouré de sa femme et de ses organes vitaux. Mention spéciale à la potée Marie, à la tarte aux poireaux Knorr, à la bouillabaisse Findus et à tous les cassoulets du monde qui ont œuvré dans l’ombre pour ce film. Elle est pas belle, la vie ?
14 janvier 2007

Mémoires d'une Geisha

Date de sortie : 01 Mars 2006 Réalisé par Rob Marshall Avec Zhang Ziyi, Gong Li, Michelle Yeoh Film américain. Genre : Drame, Romance Durée : 2h 20min. Année de production : 2004 Titre original : Memories of a Geisha LA GEISHA SUR UN TOIT BRULANT Une musique orientalisante mystérieuse s'élève sur un paysage brumeux. Pour nous dévoiler l'Orient dans ce qu'il a de plus mystérieux, de plus raffiné, de plus secret, Rob Marshall s'est muni d'un lexique "Petit fûté" japonais-anglais, d'un conseiller métaphores, d'un conseiller lieux communs, d'un consultant éventail, d'un conseiller cerisiers en fleurs, d'un joueur de cithare couinante, d'un conseiller architecture du quartier des plaisirs, d'une voix-off. Mis à part un scénariste, donc, tout le monde était là pour créer Mémoires d'une Geisha . Sans complexes, avec la belle innocence des pionniers, Rob Marshall a choisi uniquement des acteurs Chinois (y compris le chien, un pékinois), provoquant un regain de tensions internationales entre ces deux pays qui n’avaient pas précisément besoin de ça. Mais c’est pour l’amour de l’art. Nous sommes au Japon , donc. Où exactement? Rob Marshall, qui a oublié son Atlas, se garde bien de nous le dire, et garde un silence prudent. Le film obéit à trois règles. Règle numéro un : les Japonais ne sont pas comme nous, heureusement ils parlent tous anglais, ce qui est bien sympathique de leur part. Règle numéro deux : les Japonais ne font pas un dialogue sans métaphore. Règle numéro trois : les ennuis arrivent quand il pleut. La geisha est interprétée pendant vingt minutes par une gamine stridente à qui on a mis des lentilles de contact : elle est censée avoir « les yeux couleur de pluie », et le casting s'extasie sur ses Freshlook tout en faisant des métaphores: « Chyio, tes yeux couleur de pluie montrent que tu as de l'eau en toi. L'eau est forte, qui peut se frayer un chemin entre les pierres, qui coule sans cesse, et que s'appellerio Quézac ». Vendue par ses parents pendant la scène initiale , Chyio n’est plus qu’un sombre écueil : elle va dans une oikya, une école de geisha. C'est-à-dire que les petites en sont à la théorie (lancer de l'éventail, sourire subtil visant à arrêter un homme d'un seul regard, course en soques), et pour la pratique c'est Gong Li, prénommée Mamamoto, une femme blessée par la vie -les geishas n'ont pas droit à l'amour- qui ramène de quoi manger. L'école est dirigée par une maquerelle sournoise qui fume la pipe sur les conseils du consultant pipe. La pipe n'est pas n'importe qui : elle a été formée par Stanislavski, et atteint une intensité rare dans les scènes de forte tension dramatique, en contemplant l'interlocuteur de la maquerelle de son petit oeil jaune. Badinage et persiflage sont les deux mamelles de la geisha. Elle doit également s'entraîner à arrêter les hommes d'un seul regard. Après avoir provoqué plusieurs accidents dans la rue, et envoyé une dizaine de figurants à l'hôpital par la seule force de ses yeux couleur de pluie, une geisha peut se dire prête. Jalouse, Gong Li déteste notre héroïne, n'a de cesse de la coincer entre deux tatamis pour lui susurrer des horreurs, et la fait fouetter dès qu'elle peut en éclatant d'un rire maniaque. Quelle race cruelle. L'air de rien, le metteur en scène écoule des stocks - shots de remontrances, de cerisiers en fleurs et de cours de cithare. L'apprentie geisha se sent une âme de Yamakasi et escalade les toits du quartier chaud pour retrouver sa sœur : c’est la geisha sur un toit glissant. Malheureusement, le conseiller toitures anciennes avait prévu le coup : avec l'aide du conseiller scènes dramatiques, il l'empêche d'aller plus loin, et elle glisse sur les toits mouillés. Pour la punir, la propriétaire la prive de cours d'éventail, de maintien sur chaussures compensées japonaises, de sourire subtil, de jeu à la cithare qui fait boing. Désespérée, elle pleure sur un pont. Elle croise Chow-Yun -Fat, président d'une compagnie d'électricité, qui lui offre un granité, et qui, épaulé par un conseiller métaphores déterminé , se lance dans une tirade sur les bienfaits de l'électricité qui ne peut exister sans l'eau. Après une demi-heure de réflexion intense, l'héroïne décide de se dire qu'il s'agit d'un compliment . L'horizon s'entrouvre pour Chyio, mais il faudra qu'elle attende la scène 30 pour devenir enfin une geisha, car elle doit contrer les projets de Gong Li, se faire adopter par la maquerelle pipelette pour hériter, vendre son mizuage (terme habilement conservé en japonais sur les conseils du consultant érotisme exotique) à l'encan , retrouver le président. Le conseiller métaphore ne se laisse pas distancer : « Que fait l'eau quand elle rencontre la pierre? La cuillère quand elle tape contre le bol? Le renard timide face au roseau croassant? A toi de réfléchir ». Mamamoto explose de fureur devant le triomphe de sa rivale. La geisha parvient enfin à évincer Gong Li, pour qui sonne le glas : les cheveux épars, Mamamoto dérape et s'enfonce dans les rues du quartier des plaisirs après avoir allumé le feu dans l'oikyia. Prévenus par le consultant incendie, les pensionnaires parviennent à sauver les kimonos précieux. La maquerelle adopte l'héroïne, laissant ainsi de côté une comparse nommée Citrouille (une idée lumineuse du conseiller onomastique, viré peu après), à qui la directrice de casting avait fait miroiter un rôle principal. La malheureuse, qui ne se doutait de rien, (même si son prénom aurait pu l'aiguiller), ignorait que les citrouilles ne se transforment pas en princesses, que les dés sont pipés, et jure de se venger, ce qu'elle fera dans la scène 35. Tout semble s'annoncer pour le mieux : il est fou, Afflelou, et toute la ville court après les yeux de l'héroïne. Un baron lubrique la coince chez lui sous le fallacieux prétexte de lui montrer sa collection de kimonos, on craint un instant une dévaluation du mizuage de l'héroïne à cause de sa réputation, mais tout s'arrange, et c'est finalement un docteur riche qui lance une OPA. Les cours des bourses restent stables. Cela dit, le conseiller lieux communs et la voix-off sont d'accords sur un point : devenir objet du désir fantasmatique de tous, c'est du boulot : entre les cours de peinture sur soie , et de peinture sur soi pour mettre le fard, la pose du rouge à lèvres et du goudron dans les cheveux, la geisha n'a pas une minute à elle. D'ailleurs « souffrance et beauté sont indissociables », affirme un figurant lors de son quart d'heure de gloire. On regrette que Rob Marshall n'ait pas médité davantage cette phrase. Heureusement, aidée par une armée de figurants dévoués et anonymes que nous remercions publiquement ici, la geisha est fin prête pour briser les cœurs. Malheureusement il n'y avait pas de module de géopolitique à l'école des geishas, et la guerre disperse ce monde de rêve : voilà la geisha obligée de travailler de ses mains, jusqu'à ce qu'on vienne la rechercher pour négocier un important contrat avec le colonel Derricks -aucun rapport-, un Américain. Le monde d'après-guerre a bien changé, ainsi que l'indique la bande originale, avec l'apparition d'un consultant jazzy, et chacun cherche sa geisha. Après d'autres aventures rythmées par des métaphores plus démentes que jamais, la geisha et le président se retrouvent sur un pont. La voix off prend alors conscience du fait que les geishas ne sont que des femmes de l'ombre et des objets du désir. Le conseiller métaphore donne tout ce qu'il a dans la scène finale, les cerisiers applaudissent. La pipe et Zhang Zihi sont toutes deux nominées à l'oscar de la meilleure actrice. Geisha ne va pas si mal, finalement.
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14 janvier 2007

La femme de Gilles

Date de sortie : 15 Septembre 2004    Réalisé par Frédéric Fonteyne Avec Emmanuelle Devos, Clovis Cornillac, Laura Smet Genre : Drame Durée : 1h 43min. Année de production : 2003 LA FEMME AGILE Animés par un zèle patriotique peu commun, nous sommes allés voir La femme de Gilles, pour que vive le cinéma français. La femme de Gilles, comme son nom l’indique, c’est donc l’histoire de la femme de Gilles, qui s’appelle Elisa (pas Gilles, vous nous avez compris). Mais bien sûr, son nom n’apparaît pas dans le titre, d’abord pour montrer qu’elle est de ces êtres qui subissent l’Histoire, au même titre qu’Emma Bovary, Félicité dans Un cœur Simple et Lorie, ensuite parce que « Elisa », c’était déjà pris. La femme de Gilles, c’est Emmanuelle Devos, une campagnarde fruste (elle lave son linge), qui, contrairement à son homonyme le lapin, ne connaîtra jamais les joies de la butte Montmartre. Elle est sensuelle (son mari la saute en rentrant de la mine), vêtue de chandails élimés (elle ne prend pas soin d’elle), mais bleus (ils font ressortir ses yeux agrandis par la fatalité campagnarde). L’action se déroule dans le Berry, la Charente, la Bourgogne, le Languedoc-Roussillon ou le Pas-de-Calais, enfin n’importe où il y a du soleil, des potagers, des effets de lumière pour faire joli dans les cheveux des enfants, et où le Conseil Général a de quoi subventionner un long métrage. Gilles est interprété par Clovis Cornillac : il est court, râblé, assez musclé pour faire se pâmer les non-ménagères de plus de 50 ans qui sont dans la salle, il travaille à la mine, mais il a visiblement des horaires aménagés, car ( et là, la Fatalité Paysanne aiguise sa faux), il a le temps de lutiner Laura Smet, sœur de la femme de Gilles, qui travaille dans une mercerie à la ville (Ceci est un symbole social). Elisa s’en aperçoit, et c’est le drame. Enfin, quand je dis « c’est le drame », je simplifie. Le drame consiste à filmer Emmanuelle Devos derrière sa fenêtre, ou derrière son potager, ou derrière ses enfants. Quand Laura Smet se détache de Clovis Cornillac, c’est à nouveau le drame et les plans fixes jaillissent : fulgurance d’images insoutenables, qui se succèdent à un rythme infernal : Emmanuelle Devos, derrière sa fenêtre, regarde la route et ferme son gilet d’un geste machinal. Emmanuelle Devos et Clovis Cornillac se contemplent, muets, assis à la table de la cuisine. La machine infernale est en marche et poursuit son œuvre de destruction, et Gilles fait de sa femme sa confidente, car souffre le martyre. Celle-ci subit son destin et s’avilit jusqu’à épier sa sœur pour son mari. Dans une série d’images stromboscopiques hallucinantes qui déclenchèrent de terribles crises d’épilepsie dans le public, on voit les saisons qui s’écoulent, et jaillissent, insoutenables. L’eau, inéluctable, tombe dans le seau, et le cruel piou piou des oiseaux semblent autant de sarcasmes cruels de la Nature, cette mère si belle et si impitoyable. Les dialogues s’échangent à une vitesse folle, lourds de sous-entendus (« Tu veux du café ? – Il est froid. »). Mais je ne te laisserai pas te languir de la sorte, ami lecteur : ce qui devait arriver arriva, et Elisa, papillon crucifié sur la roue du Destin, se suicide alors même que Gilles avait fini son escapade : les femmes, quel mystère. Le film dure 1h 43. 1 h 43 de seaux remplis d’eau, de lourds silences, de goûters au soleil, de rire d’enfant, de froissements de chemises de nuit en lin. On notera la folle activité sexuelle de Gilles, hélas éjaculateur précoce. On notera aussi avec quelle facilité des spectatrices entre deux âges, qui s’offusquent d’une scène un peu déshabillée dans un film qui se déroule à l’époque contemporaine, acceptent sans broncher que les personnages d’un film « en costumes » les ôtent si facilement. Les femmes, quel mystère. LES BONUS DU DVD Les scènes coupées (3 h 43) Emmanuelle Devos et Clovis Cornillac interprètent « Savez-vous planter des choux » , accompagnés par un biniou ancien du mont Ventoux ( 15 min) Les conseils de Nicolas le jardinier sur la taille des pommiers (24 min) Court-métrage « Charentes-Maritimes, une région à vivre » réalisé par Frédéric Fonteyne Court-métrage « Haute-Vienne, une région à vivre » réalisé par Frédéric Fonteyne Court-métrage «  Normandie, une région à vivre » réalisé par Frédéric Fonteyne Court-métrage « Haute-Marne, une région à vivre » réalisé par Frédéric Fonteyne « La mandoline en bas-pays périgourdin » reportage réalisé par Frédéric Fonteyne Interview des interprètes : Emmanuelle Devos, Clovis Cornillac, Laura Smet , Zaza la bassine en émail, Kiki le poirier et Jojo l’Etourneau
14 janvier 2007

ISOLATION

Tout commence quelque part entre l’Albanie et la Cornouailles, dans une ferme très sale en Angleterre, qu’habite un fermier ruiné, trompé et dépassé par les événements. Un couple de squatters est venu s’installer à la porte de la ferme, dans laquelle le fermier a accepté de livrer ses vaches à des expériences génétiques visant à améliorer la fécondité des vaches. Comme dirait l’autre, là où il y a du gène il n’y a pas de plaisir. Une vache est enceinte, et la vétérinaire qui vient l’examiner se fait mordre. La vache ! « Sans doute une contraction utérine » dit le savant fou qui a organisé l’expérience. L’accouchement se déclenche en pleine nuit, et le fermier va chercher les squatters pour qu’ils mettent la main à la patte. La vache accouche d’un veau plein de dents (un veaurace, donc) et déjà fécond (comme quoi l’expérience n’a pas totalement raté). Pendant que le veau dort, la vétérinaire l’examine. Elle le tue, mais laisse négligemment en vie un de ses fœtus, une sorte d’écrevisse agressive. Elle s’enfuit sur ses petites pinces et mange les vaches. C’est la prospérité de l’écrevisse, et les malheurs de la vertu. Les personnages explorent la ferme à la lampe torche et vont dans des endroits gluants que même quand tu y cherches le chat tu as peur. Tout suinte, tout coule, tout va à veau – l’eau. L’écrevisse, la maligne, est cachée dans la fosse à lisier, c’est Les Dents de la Merde. « Je vais lui faire peur » déclare le fermier, qui rentre dans la fosse (profonde d’un mètre 50) avec son tracteur. Le spectateur, comme la fosse, reste sceptique, et il a bien raison : le tracteur reste coincé au milieu de la fosse, et le fermier doit la traverser. Chemin faisant, il croise le cadavre de la vétérinaire, qui a été transpercée de part en part par l’écrevisse, dans un juste retour de bâton que les défenseurs des écrevisses apprécieront. Le savant fou à l’origine de l’expérience autopsie le corps, et découvre que le monstre possède « un renouvellement cellulaire incroyable ». De ce fait, et pour des raisons qui resteront décidément obscures, les héros, pincés jusqu’au sang par l’écrevisse, sont contagieux et ne peuvent quitter la ferme « ou bien une génération sera détruite ». Puis, le savant fou décide de tuer tout le monde pour clarifier la situation. Mais il est à son tour attaqué par l’écrevisse. Homard l’a tuer. Ne restent plus, finalement, qu’une jeune femme, le fermier et le monstre mi - veau, mi – écrevisse (qui a bien profité du bon air de la campagne, de la saine nourriture et d’un gonflement inattendu du budget effets spéciaux et atteint enfin des proportions correctes vers la fin du film). Le fermier et la jeune femme sont attaqués par le monstre et par une caméra subjective (tenue par le monstre, qui filme ses forfaits). L’écrevisse va-t-elle l’emporter sur la vertu ? Non, car ses pinces sont embarrassées par la caméra. La jeune femme l’assomme à coups de barres de fer, en disant « Han ». Cependant, tout n’est pas fini : on découvre que la survivante est enceinte d’un monstre. C’est décidément une écrevisse sans fin. Saluons la performance exceptionnelle du scénariste, un précurseur qui, dédaignant les araignées, fourmis et autres tiques géantes et radioactives, a osé faire d’un veau un monstre de cinéma, ce qui ouvre bien des horizons (le hamster tueur, le mouton enragé, le paresseux assoiffé de sang). Avant lui, nul ne s’était aventuré  sur ce terrain boueux.
14 janvier 2007

DAREDEVIL

DAREDEVIL Date de sortie : 19 Mars 2003  Réalisé par Mark Steven Johnson Avec Ben Affleck, Michael Clarke Duncan, Jennifer Garner Film américain. Genre : Fantastique, Action Durée : 1h 42min. Année de production : 2002 Interdit aux moins de 12 ans « Daredevil » signifie en anglais « audacieux ». Audacieux, il l’est, Ben Affleck, pour endosser une des plus ignobles tenues de supers-héros qui soient jamais sorties de l’imagination d’un costumier névropathe prisonnier pendant 12 ans d’une usine de vêtements de poupées Barbarella en Tchéquie. Le costume de Dare se compose d’une élégante combinaison en skaï rouge, moulante, d’une ceinture en Spartax et d’un petit masque de chaton qui évoque les déguisements érotiques qu’on trouve autour de Pigalle. Daredevil, alors bambin, a été défiguré par un jet de produits chimiques, à ce que j’ai compris (je n’étais pas là quand c’est arrivé). Qu’à cela ne tienne, ce n’est pas non plus une dare, il fera jouer le quota (loi du 2 décembre 2002 sur l’insertion professionnelle des personnes handicapées) et deviendra un super (sans plomb) lui aussi. Animé par la rage de vaincre, il s’entraîne comme son papa, un vieux boxeur fini qui voudrait remonter la pente. Un bookmaker véreux lui demande de se coucher. Papa accepte mais se relève au dernier moment : le combat se déroulait sous les yeux de son fils (c’est une image). Le bookmaker véreux est rien qu’un pourri : il tue le papa de Dare, toujours sous les yeux de son fils, et c’est toujours une image. Dès lors, Dare, assoiffé de vengeance, n’a plus qu’une idée en tête (il n’en avait guère plus avant, cela dit) : venger son daron, et, corollaire, rentrer dans la combinaison en simili-cuir rouge. Difficile, certes, mais impossible n’est pas Dare : à force d’être aveugle, il a développé tous ses autres sens, et perçoit le monde « grâce aux ondes de choc », c’est-à-dire pas en couleur et au ralenti : quand la caméra adopte le point de vue de Dare, on n’est pas loin de l’entrée du train en dare de La Ciotat . Ses efforts payent : il rentre dans le costume, et court venger son père (dare-dare) et lutter contre le crime accessoirement. Le Crime dans la ville, c’est Le Caïd, un Noir immense qui fume des cigares en ricanant torvement. Dare à lui ! Naturellement, Dare ne sort que la nuit, parce qu’il est plus à égalité avec ses adversaires (sauf quand ils allument la lumière). Le jour, il est avocat-conseil dans une usine de betteraves, où il drague une collègue de bureau, Elektra, une fille équilibrée qui passe ses loisirs à jouer avec des katanas. Là, il y a comme une éclipse (je suis allé faire chauffer une pizza), mais en revenant heureusement, j’ai tout compris, et ça dardait : le papa d’Elektra avait été tué par un tueur à la solde du Caïd, nommé Le Tireur . Avec le capuchon-chaton du héros, les sous-entendus sexuels du film commencent à être lourds. A la suite de cela, Elektra plongée dans une régression paranoïaque oedipienne assez commune, katanate à tout bout de champ et des sacs de farine paient pour ce crime odieux. Objets inanimés, avez-vous donc une âme ? On espère que non, pour les sacs de farine. Quelques minutes plus tard, c’est l’affrontement : mal renseignée, Elektra s’attaque à Dare et le blesse, avant de lire le scénario. Damned ! Dare est le héros du film ! Elektra est attaquée par le Tireur qui darde des navajas et des répliques qui auraient fait honte à Jean Lefebvre dans Du mou dans la gâchette. Elektra, s’effondre, et Dare combat le Tireur, qui finit par chuter de 40 m. On peut légitimement estimer qu’il est mort. Dare a vengé son père : il rajuste son capuchon de diablotin et va combattre le Caïd, qu’il vainc mais ne rompt pas. C’est à la justice de faire son devoir. Dare ta gueule à la récré. LES BONUS DU DVD Ben Affleck parle de la personnalité complexe de son personnage (3 minutes) La genèse du film : pourquoi adapter Daredevil au cinéma? Oui, pourquoi ? Court-métrage : hommage au scénariste, mort tragiquement avant le début du tournage « Kant et Daredevil », interview du réalisateur Mark Steven Johnson, et critique de la faculté de juger du héros (1 min 30) Version en braille commentée par Gilbert Montagné. Le clip original de Amadou et Maryam en trio avec Andrea Boccelli : « La Tercera » LES MOINS DU DVD Sa forme de diablotin, peu pratique Pour chaque DVD acheté, un euro sera reversé à l’association des supers-héros aveugles.
14 janvier 2007

Da Vinci Code, Ron Howard, 2006

Tirez sur le trappiste Panique au Louvre ! Le conservateur, Jean-Pierre Marielle, a été sauvagement assassiné dans la salle des Flamands. Avant de mourir, il a quand même eu le temps de visiter tout le musée, de taguer la Joconde, de bousiller le patrimoine mondial de l’Unesco et de laisser un message codé par terre , un ensemble de chiffres qui ressemblent au tiercé dans le désordre, ainsi qu’un message d’adieu , codé lui aussi avant de se mettre tout nu et de jouer à Manpower. Balèze, le vieux. Bref, pour Tom Hanks appelé par la police française sur les lieux c’est dire si elle est perdue, il va falloir décoder. Tom Hanks enseigne les symboles à Harvard. Il passe son temps à faire des révélations sur le Féminin Sacré à ses élèves ébahis devant un écran plasma de 12 mètres sur 15, c’est dire s’il est trop fort. Bien vite, il se rend compte, et ce grâce à l’intervention de la fliquette Audrey Tautou, qui lui explique que c’est un piège, que le chef de la police, Bézu Fache (avec un prénom pareil, je le serais aussi), le soupçonne du meurtre. Celui-ci ne sait pas encore pour le graffiti sur la Joconde, ni que ce n’est pas Belle de Jour qui a gagné sur l’hippodrome de Vincennes ce matin. Il croit à un meurtre tout bête, l’imbécile. Bref revenons à notre héros. Après avoir éloigné subtilement l’inspecteur avec une trouvaille du style « Oh une vache dans l’aile égyptienne ! C’est sans doute une preuve ! », nos deux protagonistes essayent de comprendre le Quinté d’Auteuil dans le désordre, qui n’est autre que « la suite de Fibonacci ». Cette piste les mène droit à la Joconde, « dont le sourire est en fréquence horizontale », précise Tom Hanks qui n’a peur de rien décidément, Joconde qui a été taguée à l’encre sympathique par le conservateur, qui était décidément un guignol. Cette piste les re-mène jusqu’à un autre tableau de Vinci , qui a eu de la chance, il n’a pas été tagué, il a juste été retourné, le veinard. Après une folle poursuite à travers Paris, pendant laquelle Audrey Tautou parvient à semer la police française en Smart, c’est dire si la police française manque de moyens, nos deux héros se retrouvent devant une banque suisse contenant un indice supplémentaire, un Cryptex (ce n’est pas un produit anti-calcaire), sorte de Lego qui contient un papyrus protégé par un code, dis donc. C’est Suisse qui dit qui est. Tom Hanks décide d’aller demander de l’aide à un de ses amis, Teabing, infirme spécialiste de l’histoire religieuse qui se terre dans un château de la banlieue parisienne. Tom Hanks commence à comprendre le fin mot de l’histoire : Jean-Pierre Marielle était le chef du Prieuré de Sion, une organisation secrète et millénaire qui protège un secret millénaire. Avec ça, on est bien avancé. Teabing prend le relais, et leur explique que le Cryptex contient une information qui serait capable «  de mettre à bas un dogme deux fois millénaire ». Il est optimiste, Papy. Et il raconte la vraie vie de Jésus. Seulement, comme le film s’adresse à un large public, qui comme Tom Hanks, a mal à la tête d’avoir réfléchi, le réalisateur utilise subtilement le flash-back et montre ainsi une échelle appuyée contre un mur et cinq figurants en pagne hurlant Yaargl !. Teabing passe ainsi en revue toute l’histoire des Croisades, et explique que le Graal, c’est pas ce qu’on croit et qu’Indiana Jones, laissez tomber. « Mais c’est impossible ! » dit Audrey Tautou, qui a visiblement bien appris son texte. Le Graal en fait, ce n’est pas une coupe, c’est une femme, Marie Madeleine, épouse Jésus et porteuse de la lignée de ce dernier. Pour illustrer sa thèse, Teabing cite l’évangile selon Philippe, « Mais c’est impossible ! » s’écrie Audrey Tautou. Non, car ledit évangile a été refusé au congrès de Nicée, sorte de concile Vatican 0,001. Il va ensuite chercher dans l’évangile selon Marie –Madeleine (voir plus haut), évoque l’évangile selon Frédo, qui connaissait bien Jésus ( Psaume 42, Verset 12 « et Jésus entra dans le troquet et demanda à boire. Comme l’aubergiste apportait de l’eau, Jésus s’écria : Faudrait me changer ça en vin, ha, ha ha ! ») Pour résumer, Jésus avait femme et enfant et un chien appelé Médor, (dont l’évangile, rejeté au concile de Canigou – c’était un hot dogme - , n’a à ce jour pas été retrouvé). « Vous imaginez, s’écrie Teabing, les conséquences désastreuses que pourraient avoir de telles révélations sur la religion ? » « Mais c’est impossible », reprend , du tac au tac, Audrey Tautou. Bref, Tom et Audrey ont encore une heure pour retrouver le sarcophage de Marie-Madeleine, 8 mètres sur 3, en placoplâtre , qui a été vu pour la dernière fois par le grand maître de l’ordre du Temple, Jacques de Molay, brûlé par Philippe le Bel. Pour tout renseignement, appelez le 01.44.52.68.45 (de préférence le soir après 18 heures). Pour la convaincre définitivement, Teabing sort la Cène de Vinci et lui montre avec des dessins que l’apôtre à droite de Jésus est une femme et non un homme. C’est pas très poli de dire d’un peintre qu’il ne sait pas dessiner les garçons, en plus il est mort et il ne peut même pas se défendre. Teabing termine en leur disant que pour cacher ça, l’Eglise a fait tout un tas de meurtres horribles qu’on voit en flash-back. L’Eglise, non, l’Opus Dei, secte intra Vatican où tout le monde parle en roulant les r. « je vous ai apporrrrrté l’arrrrrrgent, Eminence. Bientôt, il serrrrront en notrre pouvoirrrrrr. ». L’Opus a mis à l’index le Prieuré de Sion. C’est la guerre. Et comme on parle du loup, on en voit l’albinos, car surgit le vil Silas (c’est vraiment une ordure, il ne roule même pas les r), qui a déjà trois loges maçonniques et une bonne sœur tuées à son actif. C’est également grâce à lui que le Louvre est garanti sans conservateur depuis le début du film. Après avoir maîtrisé l’individu, les craintes de Teabing sont confirmées « ils nous ont trouvés et nous serons obligés d’assister à la visite du pape en Pologne et d’aller aux JMJ. ». Il y a un complot fomenté par l’Opus Dei visant à faire taire la vérité sur Jésus Christ, c’est donc un complot ourdi et orbi. Pour terminer leur enquête, nos deux héros accompagnés de Teabing se rendent à Londres pour retrouver Marie Madeleine et parce que c’est joli au printemps. Sur le tarmac, ils retrouvent les policiers français dont Bézu Fache qui l’a mauvaise, parce que la vache c’était une fausse piste, mais il se fait encore avoir, parce que l’un des héros fait diversion en s’écriant, « Là, un scénariste avec une vache , c’est sûrement une piste ! » Nos héros sont encore sauvés ! Sans attendre, ils recherchent un autre élément du code (franchement, ça aurait pas été plus simple d’écrire directement sur la Joconde où était Marie Madeleine ? Y seraient pas un peu cons, les héros ? Ben cile. ) et se rendent à Westminster. Mais le vil Silas s’est détaché et les traque de nouveau. Il commence à être vraiment lourd. Heureusement, il meurt vite sur ce constat sinistrrre « Silas vait su, l’aurait pas venu ». Mais là, re-révélation: le méchant n’est autre que Teabing, qui manipulait l’Opus, qui a tout orchestré « pour libérer les opprimés », et veut révéler l’humanité et la descendance de Jésus devant le monde ébahi. En même temps, pendant Roland-Garros, à une semaine du Mondial, ça risque de faire un flop. Aidé en sous-main par le conseiller flash-back qui lui envoie des images subliminales pour qu’il trouve la clé de l’énigme, Tom Hanks ouvre le Cryptex, en sort le papyrus et lance le Cryptex à Teabing, qui en lâche ses cannes. Bing ! Mais re-re-révélation: Audrey-Madeleine est l’arrière-arrière arrière-petite fille de Jésus! (« Mais c’est impossible », comme dirait l’autre). Il faudra attendre cependant dix minutes supplémentaires pour avoir la vraie Rérérévélation. Tom Hanks , en relisant le livre qu’il dédicaçait dans la cène 2, comprend que Marie Madeleine est au Louvre, ce qui prouve 1) que Tom Hanks n’a pas écrit son livre 2) que le film est largement inutile. C’était bien la peine de taguer des œuvres, alors qu’un parcours fléché aurait suffi. Faut pas décoder, non plus.
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Veni, vidi, vinci
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