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Veni, vidi, vinci
16 avril 2007

une lettre à La Poste

Madame, Monsieur,

Devant envoyer l’autre jour une lettre recommandée, j’ai eu la chance de faire la queue dans le bureau de poste de la rue Philippe de Girard à Paris. J’ai d’abord cru qu’un nouveau Jeudi Noir venait d’avoir lieu, avant de découvrir que les gens qui hurlaient et se pressaient n’étaient autres que des usagers, bien mécontents, car ils étaient une quarantaine alors que deux guichets seulement étaient ouverts. A la suite d’une altercation avec une femme édentée qui émettait des doutes violents sur les capacités professionnelles et les mœurs sexuelles des guichetiers, je me suis résolue à quitter le bureau pour les cieux plus hospitaliers, du moins le croyais – je , du treizième arrondissement.

Là – bas, une autre surprise m’attendait : la foule hystérique avait fait place à une file d’attente morose telle qu’on pouvait en voir les jours d’arrivages de concombres dans les magasins d’état de l’URSS. Plus loin, un groupe morne était échoué dans les attitudes des personnages du Radeau de la Méduse, attendant un conseiller financier qui, tel le raccourci de David Vincent, ne vint jamais. Devant la caisse prioritaire se bousculaient des femmes enceintes qui comparaient les dates de conception de leurs enfants pour établir une priorité entre elles. Cà et là, dans la file, des usagers infligeaient aux autres des analyses politiques d’où il ressortait clairement que la France allait mal, que seul le maréchal Pétain était habilité à faire sortir le pays de la crise. Quelques Fouquier – Tinville au petit pied, râlant à mi – voix car on est jamais trop prudent, voulaient décimer les guichetiers pour faire un exemple. Quant à ceux – là, l’air las et terrifié, ils subissaient patiemment les assauts des gens qui avaient manifestement oublié, pendant leur deuxième heure d’attente, les règles élémentaires de la politesse. De temps en temps, un des passagers du Radeau de La Méduse s’effondrait, tandis que le reste du groupe agitait faiblement un mouchoir, lorsqu’au loin passait un conseiller financier. Après trois quarts d’heures d’attente suante, j’ai enfin pu déposer mon recommandé.

Je voulais vous faire part de mon inquiétude, mais depuis, j’ai appris que vous aviez pris la mesure de la gravité de la situation, puisque La Poste s’apprête à débloquer des fonds afin d’acheter 5000 écrans plats qui feront paraître l’attente moins longue ( Le Parisien du 20/03/07). Je vous écris donc afin de vous remercier, tout en me permettant de vous donner quelques initiatives. Pourquoi ne pas fournir aux usagers des kits de survie « La Poste », contenant des barres vitaminées, des réchauds de poche, des tentes et des appareils qui permettront de recueillir la rosée et de recycler les excréments ? Pourquoi ne pas organiser des combats à mort entre deux usagers, ou entre un usager et un guichetier, armés différemment pour que le combat dure plus longtemps?

Cordialement,

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